Pour aller plus loin
Au niveau de l’évolution du climat, ces 700 000 ans sont caractérisés par sept cycles glaciaires où alternent phases froides et phases tempérées. Au cours de ce temps long, trois étapes importantes vont marquer, selon Christine Guillaume, l’acquisition de la pensée abstraite par l’homme :
- La maîtrise du feu, qui se généralise à partir de 450 000 ans, où « il faut concevoir par observation et par expérience l’enchaînement des faits. »
- La technique de la taille en général qui nécessite de se représenter l’image de l’outil avant de le fabriquer. Et la technique de la taille dite « Levallois » en particulier « qui nécessite des chaines opératoires complexes effectuées en plusieurs phases pour obtenir les éclats souhaités. » Le débitage Levallois apparaît en Europe vers -320 000 ans.
- Enfin en dernier point, la préoccupation de l’au-delà représentée par les sépultures des premiers néandertaliens vers -60 000 ans en Europe.
Les industries lithiques (silex et roches tenaces employés comme matières premières pour la fabrication d’armes et d’outils) restent les vestiges humains les mieux conservés de cette très longue période. En l’absence de gisements stratifiés, les découvertes de nombreux galets aménagés (figure 1), protobifaces, bifaces et éclats sur des placages d’alluvions de la Moselle dans la région de Nancy (Prospections A. Janot) présentent les caractères d’une industrie archaïque du Paléolithique ancien (figure 2). En Meuse, la découverte d’un outillage, constitué pour l’essentiel de galets aménagés (figures 3 et 4), découverts dans le cadre de prospections pédestres ciblées sur des placages d’alluvions anciennes de la Meuse-Moselle, présentent aussi des caractéristiques archaïques (Prospections D. Henry). Il reste cependant à compléter ces séries embryonnaires d’industrie pour qu’elles puissent être valablement comparées aux séries du Paléolithique inférieur et moyen de Lorraine. Enfin, dans la mesure où ces séries anciennes, en l’absence de gisements clos, sont représentées uniquement par des stations de surface, il est selon, Ch. Guillaume, actuellement impossible de dépasser pour leur étude le seul stade de la typologie.
Figure 1 – Galets aménagés. Dessin Ch. Guillaume.
Figure 2 – Industrie archaïque en quartzite (Lenoncourt, Meurthe-et-Moselle).
Dessin A. Janot.
Figure 3 – Chopper (Champneuville, Le Talou, Meuse). Dessin Ch. Guillaume.
Figure 4 – Chopping-tool (Champneuville, Le Talou, Meuse). Dessin Ch. Guillaume.
Figure 5 – Biface (Vassincourt, Les sables verts). Photo Ch. Guillaume.
En un million d’années les industries du Paléolithique évoluent d’une industrie sur galets au Paléolithique ancien à une industrie sur éclats au Paléolithique moyen, puis à une industrie sur lames et lamelles au Paléolithique supérieur. Mais cette division classique en trois phases, qui évolue du galet aménagé à la pointe emmanchée, « (…) est trop simple devant la complexité des groupes humains où s’interpénètrent les diverses techniques. » Ainsi le biface (figure 5), pièce exceptionnelle, créé en Afrique par Homo erectus il y a un million d’années est encore fabriqué, en Europe, il y a 50 000 ans.
Place des industries paléolithiques de Lorraine dans la cadre chronostratigraphique du nord de l’Europe (D’après Ch. Guillaume)
Dominique Henry